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On ne peut vivre qu'à Paris

Publié le

 

 

                                                 

       « Paris, point le plus éloigné du Paradis, mais le seul endroit où il fasse bon désespérer. »  E. Cioran

 

Cioran, héros d’une bande dessinée… ainsi peut-on voir le philosophe, écrivain et surtout maître en aphorismes qu’était Cioran, roumain, apatride, expatrié en France, déambuler dans ce Paris dont pourtant il dénigra l’atmosphère.

« Il n’y a rien qui ressemble tant au néant que la gloire à Paris. »

Pessimiste, voire nihiliste, Cioran était en réalité un drôle d’oiseau inclassable, sorte de Phénix renaissant de ses cendres. L’idée du suicide lui permettait de rester en vie mais il suffit d’entendre la voix de Cioran pour se convaincre qu’il n’était point suicidaire. Et même, il était drôle ! Encore faut-il ne pas prendre Cioran au pied de la lettre !

A la fin de sa vie, nombreux étaient les déprimés qui venaient le consulter (!!!) … c’est dire ! Il n’avait bien évidemment rien à leur conseiller. Pour Cioran, le salut tenait en ceci : concernant l’âme, le rire et pour le corps, la marche. Rire et mouvement. A voir l'émergence actuelle de certains courants (psycho)thérapeutiques, on se dit que Cioran n’était rien moins qu’un précurseur dans ce domaine.

Il avait bien fallu que ce roi de l’aphorisme se dépatouille de ce réel qui, selon sa formulation, lui donnait de l’asthme. Ainsi, l’héritier de Schopenhauer trouva dans l’action d’écrire ou encore de marcher son remède à la mélancolie.

Pour celui dont la seule patrie était la langue, arpenter les rues de Paris où il crachait son désespoir (et son venin) avait sans doute pour fonction de nourrir l'inspiration avant de rejaillir sur la page blanche sous forme d’aphorismes à la manière des moralistes du XVIIIe siècle qu’il affectionnait tant. 

Dans l’album ‘On ne peut vivre qu’à Paris’ le dessinateur Patrice Reytier, au travers d’un graphisme qui n’est pas sans rappeler celui de Tintin, nous permet de suivre Cioran dans ses promenades du jardin du Luxembourg au Père Lachaise, citant par ailleurs des aphorismes inédits.

« Dans la préhistoire, on redoutait les bêtes ; dans l’histoire nous redoutons nos semblables. » (p48)

En exergue du livre, le dessinateur rappelle que Saint-John Perse disait de Cioran qu’il était « le plus important styliste de la langue française depuis Paul Valéry. » (p12)

Une BD où la couleur du trait met en lumière la plume de celui qui disait que «... ne se suicident que les optimistes qui ne peuvent plus l’être.» mais dont le titre choisi ne reflète qu'une partie de la vérité car, en réalité, la phrase de Cioran consistait à dire : « On ne peut vivre qu'à Paris, l'endroit idéal pour rater sa vie.».  

On aurait aimé que la balade en compagnie de celui qui fut lucide sur la tragédie de l'existence, se poursuive plus longtemps...

CDG

 

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